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Qu’est ce que l’anatomie ?

L’anatomie constitue avec la physiologie l’un des deux piliers de la médecine moderne. Si pendant des siècles cette science est restée statique, on peut dire que, depuis le XVIe siècle, elle n’a jamais cessé de se développer et de se diversifier, poussée en cela par le grand renouveau de la Renaissance.

Les connaissances en anatomie humaine ont longtemps reposé sur la dissection analytique de cadavres préparés au formol. De nos jours, une étude anatomique se réalise sur le sujet vivant grâce à l’imagerie médicale, qui permet d’étudier la structure interne d’un organisme sans y pénétrer. L’anatomie se pratique à deux niveaux selon que l’on étudie les structures visibles à l’œil nu ou leurs tissus constitutifs.

Anatomie macroscopique et anatomie microscopique


L’anatomie macroscopique décrit les organes soit isolément (anatomie descriptive), soit en relation avec la région du corps où ils se situent (anatomie topographique). Tous les éléments de même nature sont groupés en systèmes ou appareils; on a ainsi décrit, dans le règne animal, l’appareil digestif, l’appareil cardiovasculaire, l’appareil respiratoire, l’appareil urogénital, etc.


L’anatomie microscopique s’intéresse aux cellules (cytologie) et à leurs connexions dans un tissu organique (histologie). La technique repose sur la préparation de lamelles soumises à des colorations spécifiques pour les examiner au microscope optique ou électronique. Les lamelles sont découpées par un microtome dans un bloc de paraffine où est inclus le fragment de tissu étudié.

Disciplines de l’anatomie


L’anatomie s’est diversifiée en branches relatives à chaque structure du corps. L’étude du squelette s’appelle l’ostéologie, celle des muscles la myologie, celle du système nerveux la neuroanatomie, celle des articulations l’arthrologie, celle des vaisseaux l’angiologie, et celle des viscères la splanchnologie. Au cours des siècles se sont développées des disciplines voisines s’attachant à l’étude des altérations des organes, à la mise en rapport de la forme et des fonctions de chaque structure, et à la comparaison des différentes organisations corporelles existant au sein d’un même règne, animal ou végétal.

L’anatomie pathologique

Elle étudie les altérations d’un tissu ou d’un organe, en fonction de la maladie ou du choc qui a provoqué la mort d’un individu. Une autopsie est alors pratiquée, au cours de laquelle le médecin examine les effets en connaissant la cause. (L’autopsie médicolégale procède selon la démarche inverse: en partant de l’état du corps, il s’agit de reconstituer la cause de la mort.) L’anatomie pathologique est un domaine considérable, car de nombreuses disciplines peuvent intervenir: la chirurgie, qui décrit les lésions découvertes à l’intervention; l’endoscopie, qui permet leur examen; la radiologie, qui précise le siège d’une lésion, ou encore l’histologie, par l’observation au microscope d’un prélèvement du tissu lésé.

L’anatomie fonctionnelle

Elle prend en compte le rôle de la structure dans l’analyse de celle-ci. Elle est inséparable de la physiologie et bénéficie de toutes les techniques de pointe que l’imagerie médicale met à sa disposition.


Grâce à l’ordinateur, il est désormais possible d’explorer les structures vivantes dans leur mouvement: la visualisation du cerveau en trois dimensions et sur une infinité de plans de coupe est obtenue grâce à l’image de synthèse, et celle de la circulation sanguine grâce à l’opacification des vaisseaux. Devenue dynamique, l’anatomie fonctionnelle a remplacé la physiologie, laquelle s’est progressivement orientée vers des phénomènes purement chimiques et physiques. La mise au point d’appareils et d’outils adaptés a accompagné cette évolution.

L’anatomie comparée

Elle a pour objet les différences et les analogies au sein du règne animal. On rattache à cette discipline l’embryologie, qui décrit le développement de l’embryon dès la fécondation de l’ovule, la tératologie, qui étudie les malformations présentées par l’être vivant à sa naissance, et la paléontologie, qui tente de reconstituer, et donc de situer dans la classification, les êtres préhistoriques rencontrés seulement à l’état fossile.

L’anatomie végétale

Elle est généralement confondue avec l’histologie végétale. De la même façon que l’anatomie animale, elle étudie les différents organes et les structures des plantes; elle sert notamment à la classification des plantes fossiles.

Histoire de l’anatomie

Des traces paléolithiques de dissections utilitaires (choix et découpages précis des meilleurs morceaux de la proie attrapée) et de représentations graphiques de l’anatomie humaine ont été retrouvées. Mais elles ne pouvaient résulter d’un «savoir anatomique» en l’absence de langage spécifique, qui seul permet sa transmission. Sont reconnus comme véritables anatomistes les premiers penseurs qui s’interrogèrent sur les organes et qui firent, faute de dissection humaine autorisée, des rapprochements entre l’animal et l’homme.

L’anatomie générale

Les connaissances anatomiques des peuples de la haute Antiquité restent très limitées; la simplicité de leur vocabulaire en témoigne: ventre, tête, membres, yeux, etc. La médecine, pratiquée essentiellement par des prêtres ou des sorciers, se fonde plus sur des croyances magiques et religieuses que sur l’observation rationnelle des faits.

L’anatomie dans l’Antiquité préhellénique

Les Babyloniens, par exemple, prêtent à la salive un pouvoir créateur. Négligeant presque totalement le cerveau, ils attribuent un rôle majeur au foie, considéré comme la source et le réceptacle du sang; cette croyance, qui imprègne presque toutes les théories physiologiques émises jusqu’au XVIIe siècle, trouve encore aujourd’hui son reflet dans certaines expressions populaires, telle la «crise de foie».

Les Hébreux attribuent une grande importance aux reins.
Le rite de l’embaumement incite les Égyptiens à s’intéresser de près à l’anatomie, mais leurs connaissances, liées à des nécessités pratiques, demeurent techniques. On leur accorde d’avoir reconnu le rôle vital des poumons, d’avoir vu dans le foie non seulement la citerne originelle du sang mais aussi un organe nécessaire à la digestion et d’avoir entrevu le rôle du cœur et des vaisseaux dans l’organisme. Toutefois, il ne faut pas oublier qu’ils considèrent comme un «vaisseau» tout ce qui contient un liquide, de l’air ou des aliments: la vessie, comme l’intestin et les poumons.
Le fruit de ces constatations souvent inexactes ou mal interprétées est maigre, et il n’en a pas résulté de conceptions valables ou cohérentes sur le fonctionnement du corps humain.

L’anatomie dans l’Antiquité gréco-romaine

C’est pendant les six siècles qui séparent Hippocrate de Galien que la systématisation des sciences apparaît et que des théories sont formulées, par les penseurs grecs, dans un réel esprit scientifique.

On doit à Hippocrate (v. 460-380 av. J.-C.), chirurgien habile mais non anatomiste, d’avoir lié le cerveau aux plus hautes fonctions de l’homme: intelligence, savoir, réflexion et humeur. Mais sa théorie ne repose que sur la conception platonicienne qui allie la forme ronde, caractéristique de la tête et donc du cerveau, à la notion de perfection.

Aristote (384-322 av. J.-C.) est le premier à considérer l’anatomie comme une science fondamentale. S’il dissèque plantes et animaux, pas plus qu’Hippocrate il ne pratique ses recherches sur le corps humain. Il fonde une anatomie humaine sur celle du singe, selon sa méthode analogique. Pour Aristote, plus observateur que concepteur, le cœur est l’organe central de la circulation, mais est aussi le siège de l’âme et de la pensée.
Peu après sa mort, Ptolémée Ier puis Ptolémée II, rois d’Égypte, encouragent les dissections humaines. La ville d’Alexandrie est devenue, grâce à son libéralisme, à sa diversité ethnique, à son élite intellectuelle et à la richesse de sa bibliothèque, un grand centre de recherche scientifique qui contribue au rajeunissement de la doctrine hippocratique dans un esprit d’expérimentation et d’observation. Hérophile (v. 335-v. 280 av. J.-C.) et Érasistrate (v. 300-v. 240 av. J.-C.), tous deux membres de l’école de médecine d’Alexandrie, semblent avoir été parmi les anatomistes les plus actifs.

HérophileGrand gynécologue et grand médecin, il dissèque des corps humains et écrit des traités d’anatomie, dont un sur l’œil, ainsi qu’un manuel pour les sages-femmes. Sa plus grande contribution est d’avoir prouvé, en suivant les différents nerfs jusqu’à la moelle épinière puis jusqu’aux muscles, aux organes et à la peau, que non seulement le cerveau est le siège de l’intelligence mais aussi qu’il joue un rôle central dans le système nerveux. Il classe les nerfs en «volontaires» et «involontaires». Il reconnaît les artères comme des vaisseaux sanguins qu’il différencie des veines, met en évidence l’action motrice du cœur dans le mécanisme des pulsations, et affirme que la respiration se produit dans les tissus et les organes.

ÉrasistrateIl va plus loin qu’Hérophile dans l’étude anatomophysiologique du système nerveux: il distingue les nerfs moteurs des nerfs sensitifs et insiste sur l’importance du cervelet et le rôle vital du bulbe. Il observe que la lymphe transporte des graisses vers le cœur, décrit le rôle de l’épiglotte dans la fermeture du larynx, identifie la valve tricuspide qui sépare, dans le cœur, l’oreillette droite du ventricule droit. En revanche, malgré l’étude soutenue de l’appareil circulatoire, Érasistrate maintient, comme ses prédécesseurs, l’idée erronée selon laquelle les artères contiennent de l’air.
Malgré de nombreuses erreurs, la plupart des notions fondamentales en anatomie sont établies à la fin du règne de Cléopâtre (en 30 av. J.-C.). Les mille ans qui suivent sont beaucoup moins prolifiques. Les trésors de la bibliothèque d’Alexandrie disparaissent dans son incendie en 47 av. J.-C., puis la ville, soumise à Rome, devient l’un des principaux pôles de la chrétienté. Les autorités interdisent les dissections, et les anatomistes romains ne font que compiler leurs prédécesseurs. La même influence se fait sentir ailleurs, sauf en Arabie. Pourtant, certains médecins grecs continuent à contribuer au développement de l’anatomie, Claude Galien (v. 131-v. 201) est l’un de ceux-là.

GalienMédecin de l’empereur Marc Aurèle, formé à Pergame et à Alexandrie, il est l’un des plus grands médecins de son temps. Dans la lignée d’Hippocrate, associant anatomie et physiologie, il est le père de la physiologie expérimentale.
Ses livres, au nombre de cinq cents ont été des références durant quinze siècles, en particulier son ouvrage
Du rôle des parties du corps humain. Il montre que l’urine se forme dans les reins et non dans la vessie. Il étudie sur des animaux vivants la physiologie de l’encéphale, de la moelle épinière et des nerfs périphériques et leur action sur les muscles et les organes des sens. Il montre aussi que la section de la moelle épinière provoque la paralysie de la partie du corps parcourue par les nerfs sous-jacents à cette section.
Cependant, le pouvoir religieux, hostile aux dissections humaines, l’empêche de poursuivre ses recherches, et ses conclusions reposent, en fait, sur des dissections de veaux, de chiens, de pourceaux et de singes. S’il perpétue de fausses croyances, établies par ses prédécesseurs ou par ses contemporains, telle la formation du sang dans le foie, il énonce que c’est du sang et non de l’air qui circule dans les artères.

La médecine arabe


À partir du IIIe siècle, les études anatomiques sont virtuellement abandonnées, sauf chez les Arabes. Mais leurs travaux reposent sur des traductions, au IXe siècle, des ouvrages d’Aristote et de Galien, souvent remplies de non-sens. Au Xe siècle, les médecins arabes disposent de toutes les œuvres scientifiques élaborées dans le monde méditerranéen et se consacrent à l’étude de toutes les sciences connues. Respectés par les puissants et parlant plusieurs langues, certains, tel Avicenne en Asie centrale, ont laissé des traces dans la mémoire occidentale. En Espagne, Abulcasis (936-1013), le plus grand médecin du haut Moyen Âge, déplore les progrès médiocres en chirurgie, qu’il impute à l’ignorance en anatomie.

Surtout connu comme philosophe héritier d’Aristote, Avicenne (980-1037) publie vers l’an mille un important traité anatomique, Canon de la médecine , qui, traduit en latin par Gérard de Crémone, est enseigné dans les facultés d’Europe jusqu’au XVIIe siècle. C’est une œuvre maîtresse dans le domaine de la médecine, car elle réunit les symptômes des maladies de tout le corps sur la base d’observations sur l’homme, le singe, le porc et le chien. Cependant, ni Avicenne ni ses pairs ne menèrent à bien des études systématiques: ils cherchèrent à mettre en place une déontologie du médecin en accord avec l’islam, l’idéal grec et la morale chrétienne.

Les études anatomiques au cours du Moyen Âge

Le christianisme inaugure une longue période d’immobilisme dans le monde occidental. La religion domine à nouveau la médecine, sinon de façon directe, du moins en lui imposant le respect inconditionnel de certains dogmes hérités de l’Antiquité et conciliables avec les croyances nouvelles. Parmi les notions traditionnelles, celles qui procèdent des écrits d’Aristote et de Galien, compatibles avec le monothéisme, sont admises par l’Église et érigées en vérités absolues et immuables. Toute tentative de révision, toute velléité de discussion, même appuyée sur des faits, est alors jugée hérétique.

Les sources grecques, alors oubliées, sont redécouvertes plus tard par les médecins byzantins, juifs et arabes, puis enseignées, vers la fin du Moyen Âge, dans les écoles de médecine d’Espagne, d’Italie (Salerne), et de France (Montpellier). Au Caire, Ibn al-Nafis (1210-1288), médecin chef de l’hôpital Al-Mansouri, décrit, dans ses Commentaires anatomiques sur le Canon d’Avicenne, le mécanisme de la petite circulation, qui sera redécouverte par Servet et Harvey plusieurs siècles plus tard.
Au Moyen Âge, des documents ont été conservés par l’Église et les clercs, ainsi qu’au sein d’universités.

La fondation d’universitésL’école de médecine de Salerne, fondée au IXe siècle, est la première à aborder l’étude et l’enseignement de l’anatomie sur des cadavres humains, avec la caution de la loi. L’école de médecine de Montpellier, fondée en 1180 sur les mêmes principes (étude de la médecine intégrée à l’université), adopta la même attitude. Cette école empreinte d’un «libéralisme hippocratique» se situe au croisement des cultures judéo-arabo-islamique et italo-salernitaine. Mais ces écoles ne forment aucun grand anatomiste, la période marquant plutôt un temps de réflexion et de maturation.

L’essor de l’anatomie à la Renaissance

Plusieurs éléments concourent à faire de la Renaissance une période d’essor pour l’anatomie: la contestation religieuse de la Réforme, l’invention de l’imprimerie, le développement de nouveaux échanges entre les hommes. Les dissections humaines sont alors autorisées et l’on redécouvre les structures réelles du corps humain, étape nécessaire à la compréhension de son fonctionnement.

Ce sont les débuts de l’anatomie moderne et, avec elle, de la recherche scientifique. La transmission du savoir acquiert un support nouveau, le livre; les anatomistes italiens du XVIe siècle collaborent avec les plus grands artistes peintres de la Renaissance, et leurs traités d’anatomie sont de véritables œuvres d’art.
Avide de découvertes dans l’art et les techniques, Léonard de Vinci, que l’on a qualifié de véritable anatomiste, s’intéresse à l’anatomie descriptive, topographique, fonctionnelle et comparée. Il dissèque de nombreux cadavres, étudie le mouvement des muscles, la configuration mécanique du cœur dont il compte les battements. Il étudie aussi le rôle des poumons, la structure et le fonctionnement de l’œil. Son œuvre, inachevée, oubliée jusqu’au début du XXe siècle, ne contribuera pas aux progrès de la médecine.
L’époque, et surtout l’année 1543, est marquée par deux grandes ruptures avec les modes de pensée antérieurs: en astronomie, grâce à Copernic et à son De revolutionibus orbium coelestium libri VI, et en anatomie, grâce à Vésale et à son traité sur les structures du corps humain, De humani corporis fabrica libri septem.

Vésale, anatomiste réformateurBruxellois de naissance et médecin personnel de Charles Quint puis de Philippe II, André Vésale (v. 1514-1564) est le véritable réformateur de l’anatomie. Son travail en anatomie équivaut par son ampleur à celui d’Aristote sur le règne animal; il envisage l’anatomie descriptive, topographique et fonctionnelle, la biomécanique et les techniques anatomiques, dont il décrit les instruments.
C’est à un élève de Titien, Jan Stephan Van Kalkar, que l’on attribue de façon sûre plusieurs figures sur bois, parmi les trois cents qui illustrent l’œuvre de Vésale; elles présentent pour la première fois les muscles d’un homme en mouvement. Vésale n’affirme que ce qu’il observe lors de ses dissections et corrige les erreurs de Galien; en comparant les anatomies animale et humaine, il note combien est trompeuse l’extrapolation de l’une à l’autre. Ses successeurs compléteront la majeure partie des connaissances en anatomie macroscopique.

L’enseignement de l’anatomieIl n’est plus réservé aux médecins: les chirurgiens peuvent désormais l’exercer. Le XVIe siècle est l’âge d’or de l’anatomie, surtout en Italie, avec l’école de Padoue, où sont formés Gabriel Fallope (1523-1562) et Girolamo Fabrici di Acquapendente (1533-1619), lequel pratique l’anatomie comparée, l’embryologie, l’anatomie fonctionnelle et étudie les mécanismes de la locomotion. En Espagne, Michel Servet (1511-1553) décrit la petite circulation, alors que le mot «circulation» ne sera introduit qu’en 1569 par Andrea Cesalpino pour enfin signifier que le sang ne stagne pas dans les veines. C’est l’époque des theatrum anatomicum, où les gens se pressent pour admirer des reproductions artistiques du corps humain.
William Harvey (1578-1657) porte le travail de Vésale à maturité. Il affirme le premier, en 1625, que le sang décrit un cycle parcourant successivement le cœur gauche et les artères, pour revenir au cœur droit par les veines. Il postule aussi, sans le visualiser, l’existence d’un réseau de capillaires innombrables et microscopiques. Cette théorie avant-gardiste ne sera vérifiée qu’après la découverte du microscope. À la même époque, l’anatomie devient une science à part entière, des écoles et des sociétés scientifiques se créent, de nombreux livres et atlas sont publiés et des lois adoptées pour contrôler l’acquisition, par la science, de cadavres humains.

L’anatomie microscopique


Le microscope, mis au point par Zacharias Jansen en 1604, permet de pousser l’investigation en anatomie jusqu’aux structures invisibles à l’œil nu. Les premières observations de cellules, ou d’organismes unicellulaires, sont d’ailleurs faites sans que le terme «cellule» soit défini. La technique du microscope trouve ses applications dans divers domaines, soit en les complétant, comme l’anatomie comparée, soit en les créant, comme l’histologie, la cytologie, l’embryologie et l’anatomopathologie.

Le XVIIe siècle est marqué par les découvertes de la grande circulation et du système lymphatique, un début d’étude scientifique sur la génération et la mise en place de la théorie de l’homme-machine par Descartes.
L’hypothèse de Harvey, sur le passage du sang des artères vers les veines, restait à valider: c’est ce qu’a amorcé Malpighi, en 1661, et ce qu’a confirmé Van Leeuwenhoek, en 1668.
Marcello Malpighi (1628-1694) montre que le sang passe d’abord dans les capillaires pulmonaires avant de revenir au cœur gauche. Il fait de nombreuses observations histologiques, parmi lesquelles la couche génératrice à la base de l’épiderme et les néphrons, unités fonctionnelles de filtration dans les reins.
Antonie Van Leeuwenhoek (1632-1723) décrit, le premier, les striations du muscle squelettique et du muscle cardiaque, et observe des micro-organismes, bactéries et protozoaires, et surtout, en 1677, les «vers spermatiques», appelés plus tard spermatozoïdes. Il apporte la preuve visuelle qui valide la théorie de Harvey sur la circulation sanguine.
Un autre microanatomiste, Jan Swammerdam (1637-1680), fait de remarquables études sur l’anatomie du développement de différents insectes, et il est le premier à observer et à décrire les globules rouges, en 1658.

Les progrès en cytologie

Nicolas Sténon (1638-1686), en montrant que le cœur est un muscle, finit de décrire le système de la circulation sanguine. L’astronome et mathématicien Robert Hooke (1635-1703) publie, en 1665, le résultat de ses travaux sur l’anatomie des plantes dans un ouvrage intitulé Micrographia. À partir de ses observations sur le liège, il inventa le terme «cellule», que des chercheurs du XIXe siècle reprendront pour définir leur concept d’unité structurelle des tissus. Avant eux, Kaspar Friedrich Wolff (1733-1794) montre, à partir d’une étude approfondie en embryologie, que les cellules sont les «briques» servant à la construction des organes.

Bientôt, grâce aux progrès en microscopie, Robert Brown (1773-1858) découvre le noyau cellulaire. Matthias Jakob Schleiden (1804-1881) et Theodor Schwann (1810-1882) formulent, en 1840, la théorie selon laquelle tout tissu, y compris l’os, le tendon ou le ligament, est constitué de cellules; ils donnent alors à la cytologie son statut de science à part entière.
C’est vers la fin du XVIIe siècle que l’histologie obtient la même reconnaissance.

Le développement de l’histologie


L’histologie progresse avec l’amélioration du microscope, en 1663, par Hudde, l’invention du microtome, appareil utilisé pour découper de fines sections de tissus animaux ou végétaux, et la mise au point de techniques de coloration. Xavier Bichat (1771-1802) note les similitudes entre tissus topographiquement différents, ce qui lui permet de définir trois catégories: les tissus nerveux, musculaire et conjonctif. Il ouvre le champ de l’histologie, qui s’épanouira au XIXe siècle.


Entre-temps, au XVIIIe siècle, était né un véritable engouement pour l’anatomie générale, dont on rechercha les multiples applications. Ainsi se développèrent l’anatomie comparée, l’anthropologie et l’anatomie structurelle. En 1803 est créée la Société anatomique de Paris, par Laennec, Dupuytren et Cruveilhier.

L’anatomie comparée


Cette discipline étudie, à travers le règne animal, l’évolution structurelle et les adaptations, anatomique et physiologique, des organismes en réponse aux caractéristiques de leur environnement. Aristote est l’un des premiers à pratiquer la dissection comparée dans un but de classification; Galien, lui aussi, la pratique pour mieux comprendre l’anatomie humaine. Dès la Renaissance, d’autres anatomistes contribuent à son développement, mais c’est Buffon (1707-1788) qui effectue le plus gros travail de recherche et d’écriture en la matière. Il consacre à l’anatomie comparée les quinze premiers volumes des trente-six que compte son ouvrage publié de 1749 à 1804: Histoire naturelle, générale et particulière.


Le baron Georges Cuvier (1769-1832) s’engage dans la voie ainsi ouverte en prenant en compte toutes les connaissances sur les animaux fossiles et contemporains. Il effectue un travail de synthèse et établit des théories, non pas préconçues mais reposant sur des faits solides, et publie une encyclopédie, en neuf volumes, intitulée le Règne animal distribué d’après son organisation. De nombreux anatomistes prolongent son œuvre, mais aucun n’apporte autant que Richard Owen (1804-1892), qui énonce le concept d’homologie: l’aile de la chauve-souris, par exemple, est l’homologue du bras de l’homme, car ces deux membres ont pour origine la même région de l’embryon.

L’organogenèse et la paléontologie fournissent des outils pour résoudre les grands problèmes de l’origine et de l’évolution des espèces, auxquels Lamarck et Charles Darwin apportent les réponses les plus célèbres.

L’anatomie du développement

Si Empédocle, au Ve siècle av. J.-C., dissèque des fœtus humains et décrit leurs muscles et leurs ligaments, on considère que les premières études d’embryologie remontent au XVIIe siècle avec les travaux de Swammerdam sur les invertébrés et ceux de Malpighi sur les poussins. Il faut attendre le XIXe siècle pour que cette science acquière ses lettres de noblesse avec des embryologistes de renom tels que E.R. Lankester (1847-1929), Richard Hertwig (1850-1937), et surtout son frère Oskar Hertwig (1849-1922), qui montre que la fécondation résulte de la fusion du noyau du gamète mâle avec celui du gamète femelle.

Francis Balfour (1851-1882) publie en 1880-1881 un traité d’embryologie comparée, en deux volumes, le premier concernant les invertébrés, le second les vertébrés; Karl Ernst von Baer (1792-1876) confirme le rôle de l’ovule et sa fécondation par le spermatozoïde, et décrit le développement de l’œuf. Il établit une loi biogénétique relative aux différents stades de développement qui sera modifiée par Ernst Haeckel (1834-1919). Celui-ci, partisan de la théorie transformiste de Darwin, émet l’hypothèse intéressante que les organismes évolués, tels les mammifères, passent progressivement, lors de leur embryogenèse, par des stades ancestraux, y compris le stade «poisson» et le stade «amphibien». Ce concept que l’on résume par «l’ontogénie récapitule la phylogénie», bien qu’incorrect, correspond à quelques caractéristiques du développement.
La tératologie expérimentale, enfin, fut fondée par Étienne Geoffroy Saint-Hilaire (1772-1844) qui, opposé à Cuvier, défend la théorie du transformisme; son fils, Isidore (1805-1861), poursuit ses travaux en tératologie et fonde la Société nationale d’acclimatation de France.

L’anatomie pathologique

L’étude systématique des lésions qui sont la cause ou la conséquence des maladies, abordée par Théophile Bonet (1620-1689) de Genève et par quelques autres, a pour illustre fondateur l’Italien Giovanni Battista Morgagni (1682-1771). L’essentiel de son œuvre repose sur la confrontation méthodique des anomalies constatées à l’autopsie et des troubles cliniques enregistrés du vivant du malade; son ouvrage De sedibus et causis morborum per anatomen indagatis (1761) touche à presque tous les domaines de la pathologie (lésion de l’aorte, lésions dues à la tuberculose pulmonaire et méningée, etc.).

Jean Cruveilhier (1791-1874), élève de Guillaume Dupuytren et auteur d’un grand traité d’anatomie pathologique, enseigne cette discipline à la faculté de médecine de Paris à partir de 1825; il occupe la première chaire d’anatomie pathologique, créée en 1836.

L’anatomie actuelle


Le concept d’«anatomie» a beaucoup évolué sur le plan de la médecine: depuis Röntgen et la découverte des rayons X en 1895, les moyens d’exploration visuelle du corps humain n’ont cessé de se développer puisque aujourd’hui on peut non seulement visualiser l’ensemble des structures internes vivantes, mais aussi en mémoriser les images. Dorénavant, à l’anatomie est associée la notion de mouvement  déjà recherché par l’illustrateur de Vésale , notion qui introduit à son tour celle de fonction: l’étude d’un muscle, de sa forme et de ses insertions reste incomplète si l’on n’explique pas son rôle dans le mouvement. De statique, l’anatomie est devenue dynamique grâce à l’utilisation de méthodes de densimétrie (scanner, échographie, artériographie, phlébographie, etc.) appliquées à l’aide d’appareils spécifiques, ou par le recours à d’autres méthodes, telle la scintigraphie.

Le champ d’action de l’anatomie s’est considérablement élargi et enrichi de disciplines telles que la physique, la biologie, la biochimie, la cytogénétique, l’histologie, la neurobiologie et la physiologie. Grâce à la physique, l’anatomiste peut, par exemple, essayer de cerner les bases anatomiques de la course chez les chevaux, du vol chez certains oiseaux, en particulier celui de l’oie, de la nage chez les animaux aquatiques.
Le bond prodigieux que l’anatomie a connu peut à présent être mesuré. Malgré un immobilisme de la fin de l’Antiquité à la Renaissance, elle n’a jamais cessé d’évoluer depuis et est devenue pluridisciplinaire. Il existe aujourd’hui plus de trente sociétés d’anatomie nationales, pour la plupart réunies dans la Fédération internationale des associations d’anatomistes, fondée par le professeur Nicolas en 1903.
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